BiographyBiographie


Jonas (1909/10/08 – 1989/05/27) is an artist of russian origin, whose family emigrated to Geneva in 1921. Jonas artistic orientation toward the mastering of space through sculpture was nourished by the contrast of the immensity of the lowland of his origin country, where he spent a peasant childhood in the intimate promiscuity with the earth, and the exiguity of the swiss territory. Jonas (8.10.1909 – 27.05.1989) est un artiste issu d’une famille d’origine russe qui émigra à Genève en 1921. Apatride, il est naturalisé français en 1959. L’orientation artistique de Jonas et sa maîtrise de l’espace par la sculpture s’est nourrie du contraste de l’immensité des plaines de son pays d’origine, où il passa une enfance paysanne en promiscuité intime avec la terre, et de l’exiguïté du territoire suisse.

atelier


atelier

He attends the Geneva Beaux-Arts school between 1926 and 1930 under the supervision of James Vibert. De 1926 à 1930, il suit l’école des beaux-arts à Genève sous la houlette de James Vibert.





Artist's OriginOrigines de l'artiste


Siegfried grew up in Moscow until 1917. His father, a lawyer, came from Lithuania and his mother from Mongolia. Both are radical with close ties to the Revolutionary Socialist Party and committed to the interests of the workers. During revolutionary times, life in Moscow is difficult, the father sends the family to the town of Doubrovka. Early rural life contact with the earth, the river and horses will leave a strong impression on Jonas. Siegfried Jonas grandit à Moscou entouré de ses frères et sœurs jusqu’en 1917. Son père, avocat, vient de Lituanie et sa mère des steppes mongoles. Militants tous deux, ils sont proches du parti des Socialistes Révolutionnaires (S.R.) et s’engagent auprès des ouvriers. Dans les années révolutionnaires, alors que Moscou manque de tout, son père choisit d’envoyer la famille dans le village de Doubrovka. Ce contact avec la vie paysanne, la terre, la rivière et les chevaux marqueront Siegfried pour le reste de sa vie.

Il garde de cette époque le plus vivant souvenir car il avait perçu des impressions durables en faisant ses premières expériences de la réalité au contact de la terre et des animaux. Les sensations qu’il avait ressenties le plus fortement, remarque-t-il, étaient presque exclusivement des sensations tactiles éprouvées, par exemple, au contact des chevaux de la ferme dont il se plaisait à flatter les croupes et les naseaux, ou encore celles provoquées par l’écorce rude des arbres dans les coupes où il accompagnait les bûcherons. Il y eut aussi le plaisir physique élémentaire que lui procuraient le malaxage et le maniement de la terre argileuse et boueuse dans laquelle il s’ébattait et qu’il s’amusait à former en tas et en boules, première tentative spontanée de modelage. Sans anticiper sur une aptitude qui se manifestera plus tard, il est vraisemblable que le développement précoce de la sensibilité tactile a été favorable à la formation d’une disposition fondamentale pour l’art de la sculpture, lui-même de nature tactile dans sa pratique comme dans ses résultats, puisque fondé sur la mise en œuvre de la matière pondérable et de la forme tangible.

Excerpt from Extrait de Gindertael, 1969 [1]



In 1921, when the Bolsheviks take over, the family must flee. As the family story has it, one day, his father reading the newspaper sees his name in the list of people who have just been executed. He quickly understands that the list has probably been switched with the one of the people to be executed: they ran away that very night. With great difficulties, they were able to reach a family member in Kovno, Lithuania. En 1921, alors que les bolcheviks prennent le pouvoir, la famille doit fuir Moscou. La petite histoire raconte qu’un jour, en ouvrant le journal, son père a eu la désagréable surprise de voir son nom parmi ceux de personnes condamnées et exécutées. Comprenant rapidement que la liste des gens à exécuter a probablement été intervertie avec celle des personnes déjà passées par les armes, la famille Jonas décide de partir dans la nuit.

jonas family

Jonas family in RussiaLa famille Jonas en Russie



Escaping the great famine in Russia in 1921-1922, after a long arduous journey, the family is able to reach relatives in the Geneva area, where they settle on a farm.

Once installed in Switzerland, his father launches a printing house, where Jonas and his younger brother are introduced to printing. Quickly Jonas becomes interested in the arts.
Après plusieurs jours à la gare à attendre un train, ils embarquent sur la plate-forme d’un train militaire jusqu’à Kovno en Lituanie où ils seront accueillis par un parent.

Face à la famine qui sévit en Russie dans les années 1921-1922, ils entament un long périple. Leur exil prend fin en Suisse où un des membres de la famille avait déjà émigré et acheté une ferme à Richelien près de Versoix.

Une fois installé en Suisse, son père monte une petite imprimerie. Après l’école, Siegfried et son jeune frère aident leur père dans son travail. Mais très rapidement, le jeune homme souhaite s’orienter vers des études d’art.


par Irène Jonas





From figurative to abstract expressionPrémices: du figuratif à l'abstrait


In 1931, Jonas goes to Paris for a two year study visit. He shows a particular interest in archaic arts, roman sculpture and traditional african art (magic art – religiosity). Among the artists that he meets, he is especially influenced by Laurens, Lipchitz and Picasso. He is more interested in artistic creative inspiration, intention and social justification than its formal objectives and esthetic vicissitude. En 1931, Jonas se rend à Paris pour un séjour d’études de deux ans. Il montre un intérêt particulier pour les arts archaïques, la sculpture romane et l’art nègre, proches d’un art magique et d’une religiosité qui le touchent. Parmi les artistes qu’il peut rencontrer, il est attiré surtout par Laurens, Lipchitz et Picasso. Il montre déjà plus d’intérêt pour les mobiles vitaux et idéologiques de la création artistique, sa justification sociale que pour des objectifs formels et des modes esthétiques.

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Sculpture figurative, 1941


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Première sculpture abstraite, 1945

Afterwards and for a while, labor for subsistence keeps Jonas away from his vocation until 1940.

First figurative, with a brief incursion into cubism, Jonas presents his first abstract artwork in 1945.

Jonas returns to Paris in 1946.

Jonas exhibits at the Salon des indépendants in 1948, at the salons Réalités Nouvelles and Jeune Sculpture starting in 1950, at the Salon de Mai in 1959. He exhibits several times more in these Salons, notably together with Picasso, Ernst, Arp …

His work is acknowledged in several publications and solo exhibitions.
Il doit ensuite se consacrer à des travaux alimentaires qui l’éloignent temporairement de sa vocation. Il reprend la sculpture en 1940.

D’abord figuratif, puis brièvement intéressé par le cubisme, Jonas propose sa première œuvre abstraite en 1945. Il ne quittera plus cette forme d’expression.

En 1946, Jonas s’établit définitivement à Paris.

Jonas exposera au Salon des indépendants en 1948, à ceux des Réalités Nouvelles et de la Jeune Sculpture à partir de 1950, au Salon de Mai en 1959, aux côtés d’artistes tels que Picasso, Ernst, Arp …

Son travail est reconnu également par des publications et lors d’expositions personnelles.




attente

Attente, 1951

victoire

No 2 (Victoire), 1951

femme genou

Femme à genou, 1948


Jonas about his definitive passage to abstract expression (in french): Ainsi Jonas explique-t-il son passage définitif à l’abstrait:

L’œuvre d’art, dont on oublie bien souvent la puissance qu’elle dégage n’est pas seulement un agencement savant ou intuitif de formes régies par un ensemble de lois esthétiques ou plastiques; elle est aussi, et surtout, l’accomplissement d’une totalité humaine, une force transcendante, l’expression d’une idéologie collective. Elle envoûte, elle domine celui qui s’identifie à elle, à plus forte raison si ce dernier ne peut lui opposer une autre idéologie qui la dépasserait.

C’est ainsi que nombre d’artistes, au lieu de dégager des arts primitifs magiques les valeurs plastiques découvertes par leurs prédécesseurs et de les actualiser en les développant dans leurs œuvres à la lumière des pensées de leur époque, (encore fallait–il faire un choix dans ce dernier domaine) se sont identifiés – il est vrai, en toute inconscience – à la démarche magique elle–même avec tout ce que cela comporte. Ils l’ont intériorisée afin de percevoir une réalité qui était de toute évidence tout autre que celle des sociétés primitives qui l’avaient sécrétée. De là, cette fausse conscience de caractère anachronique qui a eu pour conséquence de les séparer de la réalité historique de leur propre époque. L’art abstrait apparaît à ce moment comme une prise de conscience d’une rupture historique se proposant de remettre en question les fonctions des arts plastiques et leurs démarches, les situant dans le contexte de la perspective d’une culture européenne, rationnelle, scientifique, en son devenir universel.

Le mouvement de l’art abstrait fut irrésistible vers les années cinquante et avait entraîné à sa suite une forte majorité d’artistes.

Ainsi un jour, après avoir pendant de longues années introspecté la sculpture du néolithique jusqu’à nos jours, j’ai eu le sentiment que parmi toutes les voies ouvertes à ce moment dans la sculpture à Paris, une d’entre elles répondrait à mes inquiétudes et à mes besoins. Je me suis donc mis à considérer d’une façon analytique toutes les manifestations de la sculpture non–figurative, qui à ce moment s’était déjà beaucoup différenciée, en plusieurs tendances, et au cours des annnées 48 – 49, je souscrivais au mouvement général, aveuglément et sans réserve.

Le mode de création non–figuratif se justifiait à mes yeux comme étant le produit d’une très grande transformation économique, sociale et intellectuelle à l’échelle mondiale, qui bouleversait fondamentalement toutes nos valeurs et notre vision du monde. Bref, j’ai décidé de me servir d’une façon consciente de ce mode de création pour l’élaboration de la sculpture.

En supprimant la représentation de la figure humaine, du modèle animal ou végétal, comme support de l’expression (je définis l’expression comme la manifestation d’un rapport qui existe entre le monde extérieur et ma perception sensible de celui–ci), j’ai vu la possibilité d’exprimer ce rapport par une organisation de volumes dans l’espace; cette organisation étant déterminée par le contenu. Les relations des volumes entre eux et de ceux–ci avec l’ensemble déterminent partiellement leur morphologie, à l’accomplissement de laquelle participe mon expérience vécue, avec toute la somme de l’inconscient et de ses résonances.


Excerpt from Extrait de Gindertael, 1969 [1]




In the fifties, Jonas work begins to have an architectural expression. He realizes decorative motives made of metallic cutted pieces, soldered together.

The 1950 à 1956 period is rich and of abundant production.
Dans les années ’50, l'œuvre de Jonas reflète des préoccupations d’approche architecturale. Jonas travaille alors à la réalisation de reliefs muraux à base de plaques de métal découpées et assemblées par soudure.

La période de 1950 à 1956 est particulièrement fructueuse et heureuse, voit la naissance d’une abondante production.


bestiaire

Bestiaire, 1953

citadelle

Citadelle, 1952





Organic germinationsGerminations organiques


From 1956, a personal crisis combined to the general art crisis is pushing Jonas to a new direction with more organic shapes. This will first result in “Paludes” and “Tumulte”. A partir de 1956, après une période d’abstraction très construite, une crise personnelle jointe à une remise en question générale de la place de l’art abstrait poussent Jonas dans une nouvelle direction. Il explore un nouveau répertoire de formes organiques qui se concrétisera dans “Paludes” et “Tumulte”.

Paludes, 1956

Paludes, 1956




Jonas passes from his anterior relationship of a logical and rigorous organization of plastic elements to an assembly of proliferous shapes – deeply renewing his artwork morphology. De ses pièces antérieures qui alliaient la rigueur à une logique de l’organisation d’éléments plastiques, Jonas passe à un agencement de formes proliférantes – la morphologie de ses œuvres en sera renouvelée.

Tumulte, 1957

Tumulte, 1957





Jonas about organic germinations (in french): Voici ce que Jonas dit de ses germinations organiques:

Les sculptures où les arêtes faisaient fonction de structures contrastant avec les volumes d’origine organique fortement géométrisés et tendus, étaient soumises à une attitude, celle de l’Abstrait linéaire ne voulant rien accepter de la nature. Mais une conception plus près du processus biologique s’insinuait en moi, se faisait jour et s’étendait à l’interprétation des formes de l’espace et du mouvement.

A cette période de crise sur le plan personnel, correspondait une crise générale de la peinture et de la sculpture qui avait amené une scission dans l’art abstrait avec l’apparition ou l’extension de tendances antigéométriques: tachisme, peinture informelle et gestuelle, expressionnisme figuratif dont les initiateurs étaient à ma connaissance en ce moment (Asger) Jorn pour la peinture et Germaine Richier pour la sculpture.

L’application à la sculpture de la démarche gestuelle ne m’intéressait pas, l’expressionnisme figuratif non plus.

Si je passe en revue tout ce que j’ai fait, et cherche à dégager de cette courte expérience les véritables motivations et aspirations de ma propre sculpture, je constate qu’il m’a fallu remettre en question pas mal de choses. Une année s’est passée en doutes qui paralysaient mon activité. C’est à la fin de l’année 1956 que je fais « Paludes » et « Tumulte ».

Après quelques études, les formes géométriques et les plans coupés sont petit à petit éliminés de mes sculptures. Je m’adresse de plus en plus à des formes organiques qui me paraissent plus souples, plus extensibles et plus propres à exprimer une réalité aussi complexe que celle de la vie. Aujourd’hui, au fur et à mesure de mes travaux, je cherche à contrôler, à corriger et développer cette démarche.


Excerpt from Extrait de Gindertael, 1969 [1]






Architectural ArtworksOeuvres architecturales


Entrance Hall, Geneva, 1963

Entrance Hall, Geneva, 1963Hall d'entrée, Genève, 1963

From 1954 on, Jonas explores the relationship of sculpture and architecture. Many of his works during this period are integral to the design of buildings and landscapes, expressing Jonas’ will to participate in the social life of his contemporaries.
The swiss architect C.-A. Ribordy initiates the incorporation of Jonas artworks in architectural assemblies from 1964 on. Jonas will then realize imposing sculptures integrated to buildings and gardens.
Dès 1954, Jonas commence ses études architecturales dans une recherche d’union des formes d’arts. Il ressent la nécessité d’une participation plus étroite à la vie sociale de ses contemporains.
A l’initiative de l’architecte suisse C.-A. Ribordy, Jonas parviendra à incorporer ses œuvres dans des ensembles architecturaux dès 1964. Il réalisera d’imposantes œuvres intégrées à des bâtiments et jardins.




Entrance hall, Geneva, 1967

Entrance Hall, Geneva, 1967Hall d'entrée, Genève, 1967



In 1964, Jonas realizes his « grande Sirène du Léman »: En 1964, Jonas réalise sa « grande Sirène du Léman »:

… Regardons-la avec attention et nous ne manquerons pas d’être frappés par la continuité de sa forme qu’une courbe enveloppe sans interruption, une courbe dont l’œil et la main peuvent suivre aisément les subtiles inflexions et qui dessine d’un seul trait les pleins et les vides d’une entité plastique maîtresse du paysage sous tous ses angles. On ne doute pas que cette sculpture a été conçue pour son environnement, s’ouvrant à la nature et se refermant sur elle. Dans sa beauté nue, cette abstraction ne semble-t-elle pas issue des eaux comme une vénus anadyomène de bronze écumant. La fluidité de sa ligne enveloppante justifie pleinement l’allusion son titre à la « Sirène du Léman »…

Excerpt from Extrait de Gindertael, 1969 [1]



La sirène du Léman, 1964

La sirène du Léman, 1964



Caryatid, Geneva, 1988

Caryatid, Geneva, 1988Caryatide, Genève, 1988

In 1963, Jonas is expropriated from his Paris studio and buys an old farm in the Yonne, Plessis-St-Jean. He travels regularly to Geneva to work on his buildings and garden sculptures.

In 1988, the architect C.-A. Ribordy reintroduces the caryatid, in its abstract version, through Jonas.

A construction, which attracts particular attention, as it is seemingly unprecedented (J. Jenny, Construction à Genève: réinventer la Caryatide, Actuel, No 22, 1989).
Après s’être fait exproprier de son atelier parisien en 1963, Jonas achète une vieille ferme dans l’Yonne, à Plessis-St-Jean, sa résidence principale dès lors.

Il se rend régulièrement à Genève pour travailler sur ses sculptures de jardins et de bâtiments. En 1988, l’architecte C.-A. Ribordy réintroduit la Caryatide, en version abstraite, par l’intermédiaire de Jonas.

Une construction particulièrement remarquée qui ne semble pas connaître de précédent (J. Jenny, Construction à Genève: réinventer la Caryatide, Actuel, No 22, 1989).







LegacyHéritage: pour une œuvre d'art sociale


Jonas’s œuvre consists of about a hundred artworks to be found in private collections in France, Switzerland, Sweden, Chile, …, in galleries and museums.

His architectural work is spread throughout Switzerland and France; and can be admired in many gardens, building facades and foyers.

He belongs to the generation of artists who enter into modernity through Cubism, before embracing abstraction after World War II. His solid classical background, acquired in Geneva and Paris at the turn of the 1920’s and 1930’s, enables him to immediately attend the best and be admitted to the salons.

He admired Lipchitz, Laurens and Picasso, “the idols of his youth” encountered in his Parisian years. Later, some critics compared his expressive language to those of Duchamp-Villon, Jean Arp or his contemporary Emile Gilioli.

Jonas shares with these artists a search for complexity and purity of form. He develops both a language resulting from “collage”, allowing him to intervene on vast architectural surfaces, and an expression spatially unrestricted. From modeling in the ground and sheet metal cuttings of the fifties, with their organic forms, he almost naturally moves in the next decade to the simplicity of the stripped line, with metal tubing parts.

But abstraction is above all an ideological choice. He wants an art that reflects the society in which he lives, an art adapted to the “very great economic, social and intellectual transformation” of the post-war period. When he feels, from the end of the 1950s, that abstraction enters into a “dead end”, he reintroduces into his work fundamental themes, as stripped of the superfluous by their passage in abstraction. The figures of the woman, of the mother, so important in her youth, come back to haunt his artistic work from the middle of the 60’s. It is always this desire of an “acting, social artwork”, “place of exchange and communion among men”, which guides his many achievements related to the habitat in the following decades. Jonas can approach in these years, in Geneva, his dream of a sculpture no longer object of luxury, but expression of a society at a given moment.
Jonas laisse une centaine d’œuvres.

Il est de la génération d’artistes qui entrera dans la modernité par le cubisme, avant d’embrasser l’abstraction à l’issue de la deuxième guerre mondiale. Sa solide formation classique, acquise à Genève et à Paris à la charnière des années 1920 et 1930, lui permet aussitôt de fréquenter les meilleurs et d’être admis dans les salons. Il admirait Lipchitz, Laurens et Picasso, “les idoles de sa jeunesse” rencontrés dans ses années parisiennes. Plus tard, certains critiques ont rapproché son langage plastique de ceux de Duchamp-Villon, Jean Arp ou de son contemporain Emile Gilioli. Jonas partage avec ces artistes une recherche de complexité et de pureté des formes. Il développe à la fois un langage issu du “collage”, lui permettant d’intervenir sur de vastes surfaces architecturales, et une expression plus libre spatialement. Du modelage en pleine terre et des découpages en tôle des années ’50, avec leurs formes organiques, il passe dans la décennie suivante presque naturellement au dépouillement de la ligne, avec des pièces en tubulures métalliques.

Mais l’abstraction est avant tout un choix idéologique. Il veut un art qui reflète la société dans laquelle il vit, un art adapté à la “très grande transformation économique, sociale et intellectuelle” de l’après-guerre. Quand il sent, dès la fin des années '50, que l’abstraction entre dans une “impasse”, il réintroduit dans son œuvre des thèmes fondamentaux, comme dépouillés du superflu par leur passage dans l’abstraction. Les figures de la femme, de la mère, si importantes dans sa jeunesse, reviennent hanter ses pièces dès le milieu des années '60. C’est toujours cette volonté d’une “oeuvre d’art sociale, agissante”, “lieu d’échange et de communion entre les hommes” qui guide les nombreuses réalisations étroitement liées à l’habitat dans les décennies suivantes. Jonas peut approcher dans ces années, à Genève, son rêve d’une sculpture non plus objet de luxe, mais expression d’une société à un moment donné.